Pour un Internet neutre, transparent et militant

Illyse @ Expériences Numériques : PRISM, Internet Associatif…on vous dit tout !

Illyse participe à la douzième itération des Expériences Numériques à l’EPN de la Salle des Rancy. Toute la journée du 11 janvier, vous aurez l’occasion de venir discuter avec des membres de l’association de sujets tels que PRISM, le Cloud, la vie privée sur Internet…
Et promis, après, il y a de la bière ;)

Au programme ? Trois conférences.

La première a lieu de 11h à 12h et se concentre sur le fonctionnement d’Internet en général et celui d’un FAI associatif en particulier. Lyon, où est installé le deuxième gros noeud d’échange Internet en France, est le meilleur endroit pour se demander comment ça marche. Ce sera le moment de vous expliquer un peu ce que c’est, qu’être FAI associatif, quelle missions l’association se donne, quel est le rôle de la Fédération FDN…une entrée en matière dense, qui nous plonge directement dans le vif du sujet !

La deuxième conférence (de 14h à 15h) porte sur PRISM et les révélations de ces derniers moins permises par Snowden. Comment en est-on arrivé là ? Comment vivre dans une société où la surveillance est permanente, et quels changements dans notre manière de penser et faire de la politique ? On essaiera durant cette séance de mieux comprendre les tenants et les aboutissants du débat, avant d’en discuter ensemble.

Contrairement aux apparences, il n’y a pas de pause goûter et la dernière conférence reprend à 16h. C’est une « conférence participative » dont le but sera d’aller regarder les dessous du « Cloud »…Qu’est-ce qui se cache derrière ce joli angliscisme ? Quel enjeux, derrière l’accès à nos données, depuis n’importe quel coin de la planète, qui nous fait autant rêver ? Une heure de remise en perspective, loin des discours commerciaux et optimistes.

Le programme est chargé, certes, mais, vous l’avouerez, alléchant. Nous vous attendons nombreux !

Informations pratiques

La Salle des Rancy : http://www.salledesrancy.com/.
La plaquette officielle de l’événement.


Table ronde « Internet et biens communs » à la MPT le 17/10 – Compte-rendu

Le 17 octobre, nous avons organisé une table ronde, dans le cadre de Lyon en Biens Communs.

Nous proposons ici une analyse de cette discussion, avec le contexte nécessaire à sa compréhension.
La retranscription brute de la discussion est disponible ici : table_ronde_Internet.txt
Intervenant-e-s, de gauche à droite (vue depuis la salle) :

  • Jacques Raynaud , directeur MTP.
  • Jérôme Leignadier-Paradon, secrétaire régional (RA) du PP.
  • Jean Marie Chosson, élu EELV.
  • Jean-François Mourgues, président d’Illyse
  • quota_atypique, membre du bureau de la Fédération FDN, bénévole à La Quadrature du Net
  • Pierre Col, blogueur à ZDNet et directeur marketing chez Antidot
  • Romain Blachier (adjoint au maire du 7ième), blogueur, chroniqueur web.
  • Pierre-Yves Gosset, Framasoft

I – Que sont les biens communs ?

1) Définition.

Les biens communs sont des biens pouvant profiter à tou-te-s, sans exclusivité d’usage. Par exemple l’air, un banc public, ou la culture.
Internet répond à cette définition : il est le fruit d’une interconnexion de réseaux, et permet d’échanger des informations, d’apprendre, de se cultiver. Internet est à la fois un moyen d’accéder à des biens communs, mais aussi de les créer et de les améliorer.

Un bien commun peut-être le fruit d’une contribution collective : la culture en est un très bon exemple. Tout ce qu’on y apporte est basé sur des contributions antérieures.

2) Erreurs couramment répandues.

Il existe une confusion entre « bien commun » et « gratuit, libre d’accès ». Par exemple Facebook semble gratuit et libre d’accès, mais ses règles d’usages sont fixées par une entité privée (l’entreprise Facebook), et son usage implique une contrepartie : collecte de données personnelles et publicité.
Dans l’espace physique, un bar n’est pas non plus un bien commun : c’est un espace privé ouvert au public.

De même, on tend à confondre « bien public » et « bien commun », par opposition à « bien privé ». Un bien commun peut être public, privé, résulter de l’interaction entre biens publics et privés (c’est le cas d’Internet), ou en dehors de cette dichotomie : Romain Blachier donne l’exemple de terres paysannes gérées collectivement.

II – Problèmes soulevés par l’existence de biens communs.

1) Conflits avec d’autres valeurs.

Dans une économie de marché, les biens communs posent la question de savoir qui les finance et les entretient. Ce problème suscite plusieurs réponses : des acteurs différents peuvent voir un intérêt collectif à la création d’un bien commun et décider d’y contribuer ensemble. C’est le cas de Lyonix, point d’échange de trafic Internet : chaque opérateur bénéficie de son existence. La collectivité dans son ensemble en profite aussi.

Les biens communs posent aussi un problème de responsabilité, qui a été peu évoqué dans le débat : dans une société où chaque problème doit avoir un responsable clairement défini, qui est responsable des dommages qu’un bien commun peut causer ?

[Note : N’hésitez pas à apporter votre contribution sur cette question, l’espace de commentaires est fait pour ça.]

L’extrême lenteur de l’adoption des logiciels libres est certainement causée par cette question : les entreprises et administrations ont peur de quitter des logiciels ayant un éditeur bien défini, reconnu, pour des logiciels qui semblent avoir été créés par « on ne sait pas qui » et n’offrir aucune garantie. Jérôme va également dans ce sens, en rappelant que personne n’a jamais été viré pour avoir acheté des produits Microsoft. Il est nécessaire de cautionner les logiciels libres par du « sérieux institutionnel », comme le fait Jean Marie Chosson.

La même critique revient souvent au sujet de Wikipedia : on ne saurait pas qui écrit, n’importe qui pourrait raconter n’importe quoi.. il y a clairement des mentalités à changer.

Le droit d’auteur, et les droits moraux associés à une œuvre, sont actuellement en opposition frontale avec la notion de bien commun. Pour qu’il y ait bien un bien commun culturel, il est nécessaire que les personnes y contribuant fassent la démarche volontaire de détourner leur propre droit d’auteur afin d’expliciter leur volonté de partage : c’est la raison d’être des licences libres.

Le concept de « bien commun » peut également rentrer en opposition avec celui de vie privée –c’est là aussi un point de débat qui n’a pas été abordé mais que nous vous soumettons. En effet, Pierre Col a évoqué la situation de l’auto hébergement : je participe à « faire » Internet en m’autohébergeant (j’héberge mon blog, mes mails, ce sont des morceaux d’Internet), mais est-ce que pour autant les photos de mes vacances sur mon blog (autohébergé) sont un bien commun ?

2) Obstacles à une société basée sur la mise en commun de certaines ressources.

Le débat public et la vie politique sont défavorables à une réflexion sur les biens communs. Il y a des sources de confusion, comme l’articulation public/privé. Également une méconnaissance d’Internet en général (son fonctionnement, sa culture). Enfin, les personnalités politiques sont généralement peu enclines à partager leur pouvoir (y compris le pouvoir médiatique : avoir une tribune publique) qui tend à les rendre méfiantes vis à vis d’Internet. Cette méfiance se retrouve par exemple dans les difficultés d’accès aux données publiques, qui devraient être disponibles via Internet.

Certains choix techniques sont également défavorables à une orientation d’Internet vers un monde de bien communs : Pierre Col pointe du doigt le fait que l’asymétrie des débits ADSL incite à héberger son contenu chez Facebook plutôt que chez soi. Une telle situation défavorise l’existence d’un bien commun que constituerait un réseau de petits serveurs échangeant des liens et du contenu, au profit d’une architecture centralisée.

III – Avenir des biens communs.

1) Efforts privés.

Les initiatives privées suscitées par la coopération peuvent construire des biens communs. Les GIX en sont un bon exemple. Internet aussi.
Parfois, un seul acteur privé peut mettre en place un bien commun, et/ou un outil permettant de construire du bien commun : on peut citer Wikipedia, ou le framapad proposé librement par Framasoft.

2) Efforts publics.

Les institutions publiques ont un rôle majeur à jouer. Elles doivent faciliter l’accès aux données publiques, en faisant des choix techniques et juridiques allant dans ce sens. Il n’est par exemple pas normal qu’on ne puisse pas disposer de l’ensemble des lois sous forme d’une base de données librement modifiable et diffusable.

Quand les pouvoirs publics confient à un organisme privé une mission d’intérêt public (c’est exactement ce qu’est une DSP), ils doivent veiller à ce que cette mission soit remplie. Dans les faits, certains acteurs privés tendent à détourner le bien commun pour en faire un outil ne servant que leurs propres intérêts.

Les générations futures doivent être formées à un usage intelligent d’Internet. C’est délicat : il y a d’une part l’incompréhension des pouvoirs publics (Sandrine Nerva dit au sujet du B2I : « Mort de rire« ), et l’emprise qu’ont les gros groupes privés (Facebook, Google) sur les esprits.

3) Efforts citoyens.

Les FAI associatifs sont une démarche citoyenne d’amélioration d’Internet et de renforcement de son intérêt public.

À titre individuel, chacun-e peut contribuer à « améliorer l’ambiance » sur Internet afin d’en faire une richesse. Il y a une tendance à interagir dans le but d’obtenir une contrepartie (réputation, « score »), pas forcément pour rendre service à la communauté, comme l’a fait remarquer Romain Blachier. Internet est ce que nous en faisons.